Selis : détecter tôt, travailler mieux

Publié le: 16 avril 2019
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Data pipeline

 

Par Christophe Reynaud, responsable innovation chez MGI

 

 

Entre neuf et quinze : c’est le nombre de changements ou de modifications des statuts douaniers, commerciaux et administratifs, d’une marchandise en circulation. Quant aux acteurs impliqués dans l’acheminement de la marchandise ou l’octroi des statuts, comptez entre cinq et douze.

Et en ce qui concerne la quantité d’emails échangés pour une seule marchandise, on parle en centaines. Multipliez cela par le nombre de marchandises qui transitent quotidiennement par un port ou un aéroport, et vous voilà plongé dans un environnement risqué, avec des aléas qui peuvent affecter la marchandise, ou des erreurs de données qui dégradent la fluidité du transit.

Détecter au plus tôt les risques devient ainsi une clé de la compétitivité des chaînes logistiques. C’est pourquoi, au sein du laboratoire d’expérimentation « Customs & cross-border interactions » lié au projet SELIS (Shared European Logistics Intelligent Information Space)*, MGI entend apporter une solution.

Analyse de risques, l’affaire des organismes de contrôle, mais pas seulement

Aujourd’hui, les seules entités qui procèdent à des analyses de risques sont les agences de contrôles gouvernementales, et plus particulièrement les douanes ; les critères leur sont propres et les résultats, confidentiels, restent au seul usage de l’administration.

Le projet SELIS veut démontrer qu’il est possible d’instaurer un outil d’analyse de risques complémentaires à ceux actuellement en service ; les résultats pourraient en être partagés entre tous les acteurs concernés par le passage portuaire et aéroportuaire des marchandises. Un numéro de conteneur, une quantité d’articles ou un poids incohérent ? Ces critères opérationnels, basés sur des référentiels ou des règlements, peuvent s’intégrer dans un processus de détection de données à risque afin de les identifier au plus tôt et d’informer les professionnels concernés.

Trois domaines d’analyse de risques ont ainsi été déterminés par SELIS : la sûreté-sécurité, la synchronisation des opérations, et la performance des processus.

En matière de sûreté-sécurité, la présence de conteneurs pleins sans plomb ou dotés de plombs modifiés entre la déclaration ICS (Import Control System) et la soumission du manifeste dans un Cargo Community System, peut alerter l’administration des douanes et révéler l’anomalie d’une expédition.

La synchronisation des opérations qui organise les divers modes de transport pour l’acheminement peut être optimisée. La qualification de pertinence des Estimated Time of Arrival maritimes fournie par Marine Traffic, société qui localise en temps réel les navires en mer, ainsi que la détermination de priorités pour la gestion de post-acheminements multimodaux, peuvent avertir les acteurs de modifications dans la planification de leur chaîne logistique.

Enfin, la performance des processus peut être altérée en raison de données de mauvaise qualité ou d’actions spécifiques à réaliser, qu’il convient de déceler au plus tôt, afin que les acteurs puissent réagir et éviter que les risques ne se transforment en aléas. À titre d’exemple, un numéro de conteneur erroné non rectifié avant les opérations de déchargement entraîne des régularisations dans le système, et surtout empêche le déroulement de traitements automatisés, ce qui allonge le temps de passage de la marchandise sur le terminal.

Des pipelines de données

La pertinence de l’analyse de risque dépend de la quantité d’information et de la fréquence des collectes tout au long des chaînes logistiques. Nous avons donc décidé d’implémenter le concept de pipeline de données promu par le CEFACT-ONU. Ce dispositif propose un cadre normalisé, le Pipeline Data Exchange Structure, capable d’analyser tous types de documents du commerce international et d’en extraire des données utiles à l’analyse de risque aux points de passage critiques de la chaîne logistique.

Shortsea un trafic très sensible au risque 

L’évaluation des fonctionnalités de SELIS sera réalisée sur la liaison Rades-Tunis-Marseille, en raison de la complexité de ce trajet ; il combine en effet la fréquence quotidienne des touchées, la rapidité du transit-time, de seulement 36 heures, et le type des marchandises à traiter, conventionnel, en conteneur, ou Ro-Ro. Le principe de la plateforme consiste à alimenter un pipeline de données sécurisé (Selis Community Node) avec des manifestes traités dans les solutions MGI (M-Customs et Ci5), et à détecter les risques avant chargement export et déchargement import, ou pendant le transport maritime grâce à la participation de Marine Traffic. Le résultat sera partagé par les douanes, les services phytosanitaires et vétérinaires, les opérateurs de terminaux, les agents maritimes et les transitaires au travers d’un tableau de bord ou d’e-mails. Ce nouveau service permettra à chaque métier d’être plus efficace, agile, durable et robuste, tout en allégeant de façon significative sa charge administrative.

L’opération pilote se déroulera d’avril à fin septembre. Les résultats compléteront l’offre CHANNEL5 de MGI.

*Projet financé dans le cadre des appels à projet H2020 de la commission européenne. Objectif : permettre aux acteurs des communautés logistiques de gérer leurs opérations de façon plus efficace, sécurisée et durable, tout en assurant l’intégrité et la sécurité de leurs données. Trente-huit membres de treize pays participent au projet SELIS, parmi lesquels : MGI, INLECOM Systems, CLMS, CONEX, Dresden University of Technology, eBOS Technologies Ltd, IBM, Institute of Communication and Computer Systems, Marine Traffic, Zaragoza Logistics Center.